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Gilles-William Goldnadel: Qui sont les résistants de notre époque ?
Publié le 01/06/2015
FIGAROVOX/CHRONIQUE - François Hollande a célébré quatre figures de la Seconde Guerre mondiale, à l'occasion de l'entrée au Panthéon. Professeur courageux, magistrat intègre, chrétien de France: Gilles-William Goldnadel dévoile qui sont les résistants actuels de notre société.
Gilles-William Goldnadel est avocat et écrivain. Il est secrétaire national à l'UMP chargé des médias. Il préside par ailleurs l'Association France-Israël. Toutes les semaines, il décrypte l'actualité pour FigaroVox.
Par un méchant coup du sort médiatique, le scandale de la Fifa aura éclipsé ce discours de François Hollande au Panthéon qu'il voulait éclatant.
De toute façon, sans vouloir être cruel, l'oraison présidentielle n'inscrira pas profondément son sillon dans l'Histoire. On peut être sympathique et intelligent sans être éloquent et démocrate, sans être Démosthène. On ne peut à la fois être normal et Malraux. Et ce n'est pas faire injure à une éminence de l'Internationale Socialiste de lui signifier qu'il n'est ni sauveur suprême, ni César, ni tribun.
À supposer même que ce discours eut été inspiré, il n'est pas sûr qu'il aurait recueilli sa juste réception, à l'ère du négativisme obligatoire et de la nécessaire dérision. De toute manière, il semble que les Français commencent à se lasser des grand-messes incantatoires et des happening narcissiques où les discours courageux et généreux valent quittance d'action.
Que reste-t-il du rassemblement gentillet du 11 janvier et de son esprit gnangnan sanctifié ? Dès 1947, le général De Gaulle s'agaçait: «Si vous saviez ce que je m'en fous de votre 18 juin. Je les emmerde avec le 18 juin. L'esprit dans lequel ils le célèbrent, je le connais.» (G.Pompidou, Pour Rétablir, Flammarion).
Sur le fond, l'invocation vertueuse et religieuse de l'esprit sacrificiel de la Résistance appliquée à la période contemporaine, devant quatre cercueils paritaires, dont deux étaient vides, laisse un sentiment vertigineux de vacuité. Non que le chef de l'État soit, moins qu'un autre, illégitime pour l'évoquer: ni sa politique étrangère, ni sa contestation du terrorisme ne sont moins vigoureuses; mais n'avoir pas osé durant ce discours «résistant» désigner par son nom le responsable de l'actuelle barbarie, du racisme assassin, de l'antisémitisme au présent montre cruellement le combat qui reste à livrer chez beaucoup entre la détermination et la soumission. Qu'un homme comme François Hollande, loin d'être le plus atteint, doive lui aussi mener ce combat intérieur montre les ravages de l'esprit de l'époque.
La vérité, trop longtemps piétinée, triturée, torturée oblige à présent à dire que les vrais résistants contre nos temps mauvais ne se trouvent pas en nombre dans le camp de la gauche gauchisante. Il ne suffit pas de chanter le Chant des Partisans, ou de promettre sans risque, mais avec grandiloquence, que le fascisme passé ne repassera plus. Encore faut-il ne pas se compromettre avec l'esprit de collaboration avec une idéologie dominante qui aura systématiquement tyrannisé moralement, intellectuellement et socialement toute résistance à la nouvelle oppression.
Il ne se trouve pas non plus forcément dans le camp d'une opposition, dont certains de ses membres préconisent avec une lourde insistance chamberlienne «l'apaisement» et n'ont jamais voulu mener frontalement le nécessaire combat culturel contre la démission de l'État et la désertion de la nation. Je rappellerai ici qu'Alain Juppé considérait avec indulgence le pouvoir des frères musulmans en Égypte et que François Fillon, premier ministre, morigéna Jeannette Boughrab pour avoir osé dire qu'il n'existait pas d'islamistes modérés.
Les résistants d'aujourd'hui ne chassent pas au son du clairon les fantômes d'hier, ils ne chantent pas à tue-tête «Bella Ciao» en prenant la pose avantageuse de Manoukian.
C'est un professeur de collège visé par une fatwa pour avoir osé jeter un regard critique sur l'islam. C'est un journaliste du service public placardisé qui a osé s'en prendre à la mainmise gauchisante sur sa station. C'est un écrivain licencié pour avoir dit sa crainte de prendre le métro à certaines heures du soir. C'est un magistrat qui refuse une plus grande sollicitude pour les jeunes délinquants que pour les vieilles victimes, qui se verra privé d'avancement. C'est un musulman pratiquant qui milite pour l'ouverture d'une religion fermée et qui risque sa vie. C'est un juif qui refuse le dénigrement obsessionnel et criminogène d'Israël et qui sera exclu du débat médiatique. C'est un chrétien de France qui se bat contre l'arrachage des racines spirituelles de son pays et qui, moqué et méprisé, sait ce que signifie le mot désespérance.
C'est un chanteur qui risque sa carrière pour refuser de marcher au pas cadencé des faux rebelles unanimistes, ou un cinéaste qui va avouer ne pas partager l'engouement extatique pour un misérabilisme cannois finement pailleté. C'est un intellectuel qui refuse l'obsession raciale pathologique d'un antiracisme de pacotille qui empêche toute analyse objective des rapports humains et que l'on va classer extrêmement à droite sur des listes soigneusement tenues à jour par la presse résistante et de progrès. C'est un historien qui va aborder l'Histoire de l'esclavage autrement que dans le cadre de la traite transatlantique et qui pour cela fera l'objet d'une pétition et d'une menace de procès. C'est un simple citoyen qui va avouer ne pas avoir honte d'être blanc, catholique et hétérosexuel et même envisager l'organisation d'une «French Pride» , rien que pour faire bisquer les ligues de vertu. C'est un homme politique qui va être ostracisé parce qu'il ose dire non au chantage compassionnel du déferlement irrésistible et mortel d'une immigration incontrôlée.
Tous ces résistants-là risquent la mort civile, quand ce n'est pas la mort physique. Et pourtant ils aiment la vie. Ce ne sont pas des démagogues, ils ne craignent pas l'impopularité et ne sont pas obsédés par les sondages. En rien romantiques, ils ne confondent pas la poésie et la politique.
Ils ne crient pas «indignez-vous !». De toute manière, on ne les écoutera pas autant qu'un ancêtre suprême embaumé de son vivant par les iconoclastes appointés. Ils ne se prennent pas pour Guy Moquet, ils ne sont ni dans l'imposture, ni même dans la posture. Mais ils avancent en marchant droit.
La résistance, toujours discrète, est comme l'amour: moins on en parle, mieux on la fait.